Soudan : El-Facher, symbole d’une tragédie humanitaire après la prise de la ville par les paramilitaires.

Au Soudan, la ville d’El-Facher, dernier bastion de l’armée régulière au Darfour, vit une tragédie sans précédent depuis sa prise par les Forces de soutien rapides (FSR) de Mohamed Hamdan Daglo, dit « Hemetti », dimanche dernier. Après 18 mois de siège, les combats ont cédé la place à une vague de violences et de massacres, plongeant cette cité de l’ouest du pays dans le chaos le plus total.

Selon le Laboratoire de recherche humanitaire de l’Université de Yale, de nouvelles images satellites montrent des signes alarmants : absence de mouvements de population, amas de corps dans plusieurs quartiers et sur des sites universitaires ou militaires. Les chercheurs estiment que la majorité des habitants est désormais « morte, capturée ou cachée ». Ils affirment que « les indices montrant que les massacres se poursuivent sont clairement visibles ».

Médecins sans frontières (MSF) tire également la sonnette d’alarme. L’organisation dénonce des entraves à la fuite des civils vers des zones plus sûres comme Tawila, à 70 km de là. Ses équipes affirment que « des milliers de personnes » restent piégées et que celles qui tentent de s’échapper sont souvent abattues ou arrêtées. Des témoignages évoquent des habitants séparés selon leur sexe, leur âge ou leur appartenance ethnique présumée, certains étant retenus contre rançon.

« Le faible nombre de survivants arrivés à Tawila laisse présager le pire. Beaucoup de civils ont probablement été tués ou poursuivis alors qu’ils tentaient de fuir », alerte Michel-Olivier Lacharité, responsable des opérations d’urgence chez MSF. D’après l’ONU, plus de 65 000 civils ont réussi à fuir El-Facher, mais des dizaines de milliers d’autres sont toujours pris au piège. Avant l’assaut final, la ville comptait environ 260 000 habitants. Des vidéos circulant sur les réseaux sociaux montrent des exécutions sommaires attribuées aux FSR, bien que ces dernières affirment que certaines séquences ont été « fabriquées ». Face à la multiplication des témoignages, les Nations unies ont exigé des enquêtes « rapides et transparentes » sur ces atrocités.

Depuis avril 2023, la guerre entre l’armée du général Abdel Fattah al-Burhane et les FSR a déjà fait des milliers de morts et déplacé des millions de Soudanais. Aujourd’hui, El-Facher, désormais sous contrôle paramilitaire, symbolise l’effondrement humanitaire et moral d’un pays en ruine.

Amen K.

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