Le retrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger du Statut de Rome instituant la Cour pénale internationale (CPI) constitue bien plus qu’un simple geste politique. Par cet acte fondateur, l’Alliance des États du Sahel (AES) rappelle au monde que la justice internationale, lorsqu’elle se transforme en outil d’ingérence et de domination, perd toute légitimité. Cette décision courageuse doit désormais inspirer l’ensemble des pays africains, car il y va de la dignité et de la souveraineté du continent.
Depuis sa création en 2002, la CPI se présentait comme un tribunal universel voué à juger les crimes les plus graves. Mais très vite, son action a révélé un déséquilibre criant : l’immense majorité des affaires instruites concernaient exclusivement l’Afrique. À croire que seuls les dirigeants et les peuples africains étaient capables de commettre des crimes contre l’humanité. Pendant ce temps, les interventions militaires occidentales, les crimes de guerre commis au Moyen-Orient ou encore les ingérences violentes qui déstabilisent des nations entières restaient hors d’atteinte.
Cette justice sélective, qui ferme les yeux sur les crimes des grandes puissances tout en s’acharnant sur les plus vulnérables, traduit une logique d’instrumentalisation. La CPI apparaît de plus en plus comme un mécanisme néocolonial, servant à discipliner les États africains récalcitrants, plutôt qu’un véritable outil universel de lutte contre l’impunité. Dans ce contexte, la décision de l’AES est une rupture salutaire. Elle ouvre la voie à une alternative : la construction de mécanismes africains de justice et de réconciliation, adaptés aux réalités culturelles et politiques du continent. Une justice pensée par et pour l’Afrique, et non plus imposée de l’extérieur.
Si d’autres pays africains emboîtent le pas à l’AES, c’est tout l’édifice de la CPI qui pourrait s’effondrer. Une dynamique collective délégitimerait définitivement une institution déjà affaiblie par ses contradictions internes. Plus encore, elle permettrait au Sud global d’imposer une nouvelle conception de la justice internationale, libérée de l’ombre tutélaire des anciennes puissances coloniales.
L’Afrique ne rejette pas la justice, elle refuse l’injustice travestie en universalité. Sortir du Statut de Rome ne signifie pas protéger l’impunité, mais au contraire revendiquer le droit de juger selon des critères équitables et indépendants. C’est un appel à bâtir une justice souveraine, fidèle aux aspirations des peuples africains et dégagée de l’engrenage judiciaire qui perpétue la dépendance.
Aujourd’hui, le courage de l’AES doit devenir un signal pour toute l’Afrique : il est temps de briser les chaînes de la CPI et d’écrire une nouvelle page de justice, celle de la souveraineté et de la dignité retrouvées.
Amen K.