Le Tchad pourrait devenir un acteur majeur sur le marché mondial du karité, notamment du beurre de karité, grâce à son immense potentiel encore largement inexploité. Situé au cœur de la Ceinture africaine du Karité, la principale zone productrice au monde, le pays dispose d’atouts considérables que souligne une récente étude de la Société financière internationale (SFI).
Selon la SFI, le Tchad compterait environ 82 millions d’arbres de karité, principalement concentrés dans sept régions du sud (Mayo-Kebbi Est et Ouest, Tandjilé, Logone Occidental et Oriental, Mandoul, Moyen-Chari). Cela lui conférerait l’un des plus grands stocks naturels de karité au monde, avec une capacité de production estimée entre 380 000 et 800 000 tonnes de noix par an.
Ce chiffre contraste toutefois avec une étude de 2019 de l’Agence nationale des investissements et des exportations (ANIE), qui estimait la population arboricole à 50-60 millions, dont seulement 4 à 5 % exploités. Cette disparité pourrait s’expliquer par une actualisation des données ou des méthodes d’évaluation différentes.
Quoi qu’il en soit, si ce potentiel est valorisé, le Tchad pourrait rivaliser avec les géants du secteur, comme le Nigeria (345 000 tonnes en 2023), le Burkina Faso et le Mali. La SFI met particulièrement en avant la compétitivité du pays dans la production de beurre de karité, plus intéressante économiquement que la vente de noix brutes.
Alors que le marché mondial du beurre de karité connaît une croissance soutenue, évalué à 2,4 milliards $ en 2024 et projeté à 3,7 milliards $ d’ici 2030, le Tchad bénéficie d’un positionnement géographique stratégique. Cependant, la filière nationale souffre de désorganisation : manque de structuration des coopératives, faible visibilité auprès des investisseurs et difficultés d’accès au financement.
La SFI recommande des réformes majeures : révision du cadre légal pour les coopératives, accompagnement technique des productrices, mécanisme de partage des risques pour les PME, et actions de promotion (foires, forums d’investisseurs). Si ces mesures sont mises en œuvre, le karité pourrait devenir un levier économique puissant pour le Tchad, en alliant transformation locale, création d’emplois et insertion dans les chaînes de valeur régionales et internationales. Le défi reste la structuration du secteur pour transformer ce potentiel naturel en moteur de croissance durable.
Amen K.